Alors que 12 millions d’hectare de forêt tropicale ont été détruits en 2018, alors que l’homme poursuit sa course folle vers son extinction probable, comment en est-on arrivé à ce point de presque non retour où l’homme apparaît comme déconnecté mais aussi arrogant face à son environnement ?
Déconnexion, expansion et globalisation
Lorsque l’on lit « l’homme et la nature – une histoire mouvementée » de Valérie CHANSIGAUD, on se rend compte que la relation entre l’homme et la nature remonte à quelques milliers d’année, lorsque celui-ci s’est sédentarisé d’une part, et que l’humanité s’est étendue d’autre part. Ce n’est pas seulement la déconnexion de l’homme à la nature ou à sa nature animale profonde qui l’entraine vers le gouffre de l’extinction, mais aussi son expansion rapide (notamment depuis le 17ème siècle et encore plus depuis la révolution industrielle). De ce fait, l’homme prend une place de plus en plus importante, entrainant d’autres espèces vers leur déclin. Bien évidemment cela n’est pas sans laisser des conséquences graves sur son environnement.
Au fil de la lecture de cet ouvrage, on réalise que l’homme exploite ses ressources depuis quelques siècles déjà, façonnant les paysages et oubliant peu à peu de vivre en harmonie avec la nature. Les colonisations et les guerres ont un impact réel et considérable sur la destruction de l’environnement, et donc, de la biodiversité.
Il semble que l’homme ait toujours cherché à dominer la nature, ce qui a fortement impacté son lieu de vie. Il apparait que la déforestation se soit accrue au cours du 16ème siècle et résulte des mouvements de populations croissantes. Plus la ville moderne s’étend et plus le monde sauvage recule. Bien évidemment, la mondialisation n’arrangeant en rien la situation.
L’homme transformé
Dans le livre « les transformations de l’homme », Lewis MUMFORD explique comment l’homme est passé de l’animal, à l’homme archaïque, à l’homme du vieux monde puis à l’homme post-historique. Au travers cette profonde transformation, les valeurs de l’homme ont évolué et muté. Ce dernier est devenu soumis, mécontent et a surtout perdu son moi animal originel. C’est ainsi qu’il s’est déshumanisé, en se soumettant à la machine et en abandonnant ce qui le rend humain. L’homme post-historique a pu jouir du pouvoir d’estropier et de mutiler la nature dont il est désormais dépourvu de sentiments à son égard. C’est cette transformation mécanique et mondialisée qui a fait perdre pieds aux hommes, et notamment leur rapport à la nature.
Quand on fait le parallèle de ces divers ouvrages, le puzzle se construit sous nos yeux, et l’on devine aisément dans quel pétrin nous nous sommes fourrés (sciemment ou non).
La planète ne nous offre pas des biens mais des offrandes. Il est nécessaire d’arrêter de piller notre planète sous couvert de capitalisme et de rentabilité. D’ailleurs, notre juriste française Valérie CABANES l’énonce dans son ouvrage « Homo Natura » d’un point de vue juridique. La planète n’est pas notre propriété mais nous la voyons comme telle, et c’est en cela que réside le problème. L’homme s’est attribué les terres au fil de sa transformation et considère les ressources comme de simples marchandises. Et nous nous trompons : les ressources ne sont pas des marchandises mais simplement nécessaires à notre existence !
L’homme devenu machine
Tel un remake de Terminator ou d’autres films du genre, dans lesquels les machines prennent le dessus sur l’homme, l’homme n’est plus humain. Nos choix collectifs et individuels nous entrainent vers une issue fatale. Nous n’agissons non pas seulement comme des machines mais comme des zombies. L’esclavagisme et le capitalisme ont asservi l’homme à tel point qu’il en est devenu méconnaissable et totalement défiguré. Les gouvernements opèrent telles des tronçonneuses avides de sang, sans pitié et sans état d’âme. Ils nous entrainent sans merci dans une chute vertigineuse qui pourrait signer notre avènement en tant qu’espèce.
L’homme trop gourmand
Outre une avidité qui s’est accrue avec l’industrialisation, d’une part, et la globalisation d’autre part, l’homme s’avère être un exécrable gestionnaire. La mauvaise gestion de ses ressources est mise en exergue dans l’excellent livre, très documenté de Jared DIAMOND « effondrement ». L’auteur cite divers exemples tels que les Mayas, en passant par des peuples norvégiens du 6ème siècle ou encore des peuples des îles du pacifique telle que l’île de Pâques, pour n’en citer qu’une seule. La relation entre la démographie et la mauvaise gestion des ressources est démontrée dans cet ouvrage. D’ailleurs Valérie CHANSIGAUD l’énonce également : la mauvaise gestion des ressources entraine un déclin sans précédent et décime les espèces.
Malgré toutes ces connaissances, nous n’apprenons ni de l’histoire, ni de nos erreurs. Il est alors louable de se demander pourquoi ? Malgré les traités signés depuis le début du siècle dernier, rien ne semble pouvoir changer la situation. Nous sommes pris dans les chainons d’un capitalisme affamé et certainement suicidaire. Nous sommes enclins à nous demander si tel est notre destin ? Nous n’apparaissons aujourd’hui non pas que gourmands, mais aussi fous, suicidaires et inconscients.
La nature apaise et guérit
Pourquoi détruit-on cette nature, si belle et surtout essentielle à notre existence ? J’ai visionné un documentaire un peu catastrophique il y a quelques années (désolée je ne peux rappelle plus la source), et parmi les intervenants, il y avait une sociologue qui évoquait que, plus l’homme vit dans un environnement hors nature, moins il est apte à la protéger. C’est un rapport loin des yeux et loin du cœur. Quand on sait que certains citadins des grandes métropoles ne sont jamais sortis plus loin que le bitume, et que le seul bout de nature se résume à quelques arbres en train de périr au détour d’une avenue ou d’un square, il est facile de comprendre leur déconnexion, voire leur ignorance face à cette problématique environnementale. Et pourtant la nature est apaisante, elle guérit, elle nous protège et nous abrite depuis des siècles. Nous ne sommes plus sans ignorer les nombreux bienfaits des arbres et des forêts (séquestration du carbone, régénération des sols, régulation du climat, biodiversité, alimentation et médicamentation), alors protégeons-les et préservons-nous !
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La réintégration des leçons de toutes choses à l’école
Bien que mon fils de 9 ans (en CE2 d’une petite école) me raconte que sa maitresse les sensibilise à l’environnement, aux emballages et autres problématiques environnementales (merci madame la maitresse), il apparaît que la matière des leçons de toute chose soit désormais feue sur les bancs d’école. Vous rappelez-vous de cette matière où l’on apprenait des arbres, des animaux, des espèces et du vivant, mais aussi de la pyramide écologique et du lien qui nous unit tous ? La disparition des espèces animales depuis une cinquantaine d’année est alarmante, et celle des insectes encore plus. Bien que situé au bout de la chaine, ils sont pourtant vitaux et profondément importants pour notre écosystème et la vie ! En discutant récemment avec sa maitresse, elle me disait que les enfants apprenaient les sciences de la vie mais que les leçons de toute chose comme à une époque (encore non lointaine), n’existaient plus en tant que telles.
Si donc les parents ne communiquent pas (par le biais de livres, de discussions) ce que sont les arbres, la nature, les insectes et autres animaux, comment les enfants peuvent-ils en connaître les tenants et les aboutissants ? Il serait primordial de pouvoir ré-instaurer ces connaissances élémentaires plutôt que d’asséner les enfants à coup de spots publicitaires et d’écrans meurtriers et abrutissant. Il est évident qu’un nouveau modèle doit être mis en place, pour laisser de nouveau la place aux parents dans leur rôle. Il est peut-être également nécessaire de reconstruire tout un modèle reposant non plus sur la productivité et la rentabilité, mais sur le respect de la nature et la bienveillance envers les espaces verts et le monde vivant.
Nous sommes l’avenir des enfants, et les enfants sont l’avenir. Montrons-leur le chemin et apportons-leur les connaissances nécessaires (et en plus ça les fait rêver).
Redonner sa place au temps qui passe
Dans son livre « la sobriété heureuse », Pierre RABHI dénonce les effets de la modernité et l’aliénation de l’homme au travail, à l’argent mais aussi à la consommation. À travers l’argent et les biens (de consommation), l’homme en oublie ses valeurs essentielles et en perd le sens de la vie. L’argent a rendu l’homme égoïste, avide et lui a fait perdre totalement les liens qui l’attachaient à la terre. D’ailleurs dès la première page, les lignes sont émouvantes lorsqu’il narre une partie de son enfance dans l’oasis dans laquelle il vivait. Le temps n’existait pas, chacun vivait au rythme de la nature. C’est l’arrivée de la machine qui a aliéné l’homme, tout comme l’argent, car le temps, c’est de l’argent. Il évoque ainsi la perte de notre liberté et notre appétence pour le superflu et les choses abstraites.
C’est pourquoi l’homme doit (re)prendre le temps, s’arrêter et méditer. Prônant – entre autre la décroissance – il est tout un chemin spirituel nécessaire et essentiel à parcourir pour se défaire de la modernité et de la consommation à outrance.
Le temps nous passe entre les mains, redonnons-lui un sens.
Saurons-nous arrêter la spirale de la destruction ?
Alors que certains tentent de s’inspirer des peuples autochtones qui vivent en harmonie avec la nature, alors que certains se battent contre les injustices grandissantes, serons-nous en mesure de pouvoir arrêter cette spirale infernale ? Alors que les gouvernements ne prennent aucune mesure acceptable, comment amener une population toujours plus grandissante à freiner cette destruction qui semble presque inévitable ? Comment remettre l’homme à sa place quand la puissance des industriels et des lobbies nous martèlent à chaque instant ? Comment faire pour [re]connecter l’homme à sa nature profonde, et lui faire prendre conscience du mal qu’il s’inflige à lui et aux autres espèces ? Toutes ces questions résonnent en moi, mais je reste convaincue qu’il est encore possible d’inverser la courbe. Comme l’a si bien dit un jour Margaret MEAD (anthropologue américaine), « ne sous-estimez jamais qu’un petit groupe de personnes peuvent changer le monde. En fait, c’est toujours ainsi que le monde a changé ».
Signez | La Charte all4trees pour reconnaître l’importance des peuples autochtones pour la préservation des forêts
C’est entre autre pourquoi j’ai rejoins all4trees, par colère envers la destruction de la nature, pour que ma voix puisse résonner en faveur de cette belle planète, et pour tenter d’arrêter la spirale au travers la sensibilisation. Je suis fière de faire partie de cette communauté engagée et je remercie les membres fondateurs de m’avoir incluse dans cette merveilleuse histoire humaine. C’est ensemble que nous pourrons arrêter cette spirale infernale !
Pierre
Merci pour cet article. Un peu déçu malgré tout de ne pas voir aborder les causes de cette déconnexion : le besoin (devenu addiction) à l’énergie, le passage au charbon au début de l’ère industrielle a « sauvé » les forêts (cf. les travaux de Vincent Mignerot et J.M. Jancovici), également le fonctionnement de notre cerveau qui nous incite au toujours plus, lire « Le bug humain » (Sébastien Bohler).
Nathalie Tachet
Bonjour Pierre, merci pour votre commentaire. Malheureusement je ne suis pas spécialiste dans ce domaine et il aurait fallu une co-rédaction avec un expert du genre. Toutefois je prends note de cette remarque très constructive et très juste quant à notre addiction à l’énergie. Pour ce qui concerne le fonctionnement de notre cerveau, il serait judicieux de faire intervenir un(e) expert(e) dans ce domaine également. Merci pour la reco lecture 😉 A bientôt !
Franck
L’homme .Homo Sapiens…ne fait il pas partie de cette nature…..dont il a pourtant réussi à se déconnecter…Programmant sa propre Extinction….Bien fait……🙄
all4trees
L’Homme, Homo sapiens, a oublié qu’il faisait parti intégrante de la Nature. L’espèce humaine doit retrouver humblement une place apaisée au sein de la biosphère, s’intègrent dans une dynamique écosystémique et adoptent le respect du vivant et des équilibres naturels.
Jonathan Guyot
Magnifique texte Nathalie ! 🙂 En effet, la [re]connection de l’Homme à la Nature est essentielle pour que l’Humanité puisse prendre conscience de l’importance de préserver et restaurer les forêts